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NMC - Page 29

  • Marco V. García Quintela – Autour des comparaisons

    Autour des comparaisons

     

    Marco V. García Quintela

    Universidade de Santiago de Compostela 

     

    Resumen : Es frecuente el recurso a la comparación en los estudios de humanidades y ciencias sociales, y en particular en los estudios de historia de las religiones y de mitología. Por el contrario, no abunda la reflexión sobre las razones que fundamentan esta práctica. Además, las reflexiones sobre la comparación suelen hacerse desde el interior de una disciplina, obviando una mirada más general. El presente texto resume en forma de artículo largo tres aproximaciones complementarias al problema de la comparación. En primer lugar, presenta la génesis del método comparativo confundida con el origen mismo de la reflexión histórica y con un papel destacado de la comparación religiosa. Seguidamente se muestra cómo la comparación se generaliza en otros ámbitos de conocimiento y cómo se produce un diálogo entre ciencias naturales y humanas en torno a la comparación desde el siglo xix dando lugar a una serie de disciplinas con base comparativa en el siglo xx. Seguidamente, se presenta una tipología de las comparaciones enfatizando tres posiciones diferentes en relación con la práctica y cómo se expresan con unas formas semejantes en un triple plano teórico, antropológico y de la historia de las religiones. También se muestra cómo la falta de rigor metodológico en el uso o rechazo a la comparación lleva al mantenimiento de posiciones epistemológicas equívocas o poco fundamentadas. Por último, se abordan tres aspectos complementarios de la práctica comparativa. La “causalidad” y el problema de las “supervivencias” como forma de explicación comparativa con límites no siempre considerados. La analogía y sus reglas como forma de pensamiento comparativa relacionada con reflexiones de la filosofía y la psicología cognitiva y la necesidad de una reflexión analógica estructural. Finalmente se señalan los peligros derivados de la idea de “reconstrucción”, usada a veces en los estudios comparativos, que pretende otorgar a la práctica comparativa una capacidad reificadora (falsa o equívoca) en vez de asumirla como una poderosa herramienta de conocimiento.

    Palabras clave : Comparación, génesis y diversidad de la comparación, tipos de estudios comparativos, crítica o aceptación de la comparación, causalidad y supervivencia, analogía, ciencia cognitiva, estructura, reconstrucción comparativa.

    Abstract : The use of comparison is frequent in humanities and social sciences studies, and in particular in the studies of history of religions and mythology. On the other hand, there is not much reflection on the reasons behind this practice. In addition, reflections on comparison tend to be made from within a discipline, ignoring a more general view. This text summarizes in the form of a long article three complementary approaches to the problem of comparison. First, it presents the genesis of the comparative method confused with the very origin of historical reflection and with an outstanding role of religious comparison. It then shows how the comparison becomes generalised in other fields of knowledge and how a dialogue between natural and human sciences takes place around the comparison since the nineteenth century, giving rise to a series of disciplines with a comparative basis in the twentieth century. Second, a typology of comparisons is presented emphasizing three different positions in relation to practice and how they are expressed with similar forms on a triple theoretical, anthropological and history of religions plane. It is also shown how the lack of methodological rigour in the use or the rejection of comparison leads to the maintenance of epistemological positions that are equivocal or poorly founded. Third, three complementary aspects of comparative practice are dealt with. The concept of “causality» and the problem of «survivals» as a form of comparative explanation with some limits not always considered. The analogy and its rules as a form of comparative thought related to reflections of philosophy and cognitive psychology and the need for an analogical reflection structurally founded. Finally, the dangers derived from the idea of «reconstruction», sometimes used in comparative studies, are pointed out, which aims to give comparative practice a reifying capacity (false or equivocal) instead of assuming it as a powerful tool of knowledge.

    Keywords : Comparison, genesis and diversity of comparison, types of comparative studies, critique or acceptance of comparison, causality and survival, analogy, cognitive science, structure, comparative reconstruction.

    Résumé : Le recours à la comparaison est fréquent dans les études en sciences humaines et sociales, et en particulier dans les études d’histoire des religions et de mythologie. Cependant, il n’y a pas beaucoup de réflexion sur les raisons derrière cette pratique. De plus, les réflexions sur la comparaison ont tendance à être faites à l’intérieur d’une discipline, ignorant une vision plus générale. Ce texte résume sous la forme d’un long article trois approches complémentaires au problème de la comparaison. En premier lieu, il présente la genèse de la méthode comparative confondue avec l’origine même de la réflexion historique et avec un rôle remarquable de comparaison religieuse. Il montre ensuite comment la comparaison se généralise dans d’autres domaines du savoir et comment un dialogue entre sciences naturelles et sciences humaines s’établit autour de la comparaison depuis le xixe siècle, donnant naissance à une série de disciplines à base comparative au xxe siècle. Ensuite, une typologie des comparaisons est présentée en mettant l’accent sur trois positions différentes par rapport à la pratique et comment elles s’expriment avec des formes similaires sur un triple plan théorique, anthropologique et d’histoire des religions. L’on montre aussi comment le manque de rigueur méthodologique dans l’utilisation ou le rejet des comparaisons conduit au maintien de positions épistémologiques équivoques ou mal fondées. Enfin, trois aspects complémentaires de la pratique comparative sont abordés. La « causalité » et le problème des « survivances » comme forme d’explication comparative avec des limitations pas toujours prises en compte. L’analogie et ses règles en tant que forme de pensée comparative se rapportent aux réflexions de la philosophie et de la psychologie cognitive et à la nécessité d’une réflexion analogique structurelle. Enfin, on souligne les dangers dérivés de l’idée de « reconstruction », parfois utilisée dans les études comparatives, car elle vise à donner à la pratique comparative une capacité de réification (fausse ou équivoque) au lieu de l’assumer comme un outil puissant de connaissance.

    Mots-clés : Comparaison, genèse et diversité des comparaisons, types d’études comparatives, critique ou acceptation de la comparaison, causalité et survivance, analogie, science cognitive, structure, reconstruction comparative.

     

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  • (Review) Judith Kalik et Alexander Uchitel – Slavic Gods and Heroes

    Kalik.jpgJudith Kalik and Alexander Uchitel, Slavic Gods and Heroes, 2019, Londres et New York, Routledge, 186 p.

    J’ai eu à plusieurs reprises à regretter le fait qu’il ne paraît plus depuis des décennies, dans une langue occidentale, de travaux d’envergure sur la mythologie des Slaves païens. De ce fait, cette mythologie est largement méconnue des chercheurs non-slaves. Aussi la parution toute récente de Slavic Gods and Heroes, de Judith Kalik et Alexander Uchitel, ne peut qu’être saluée car, même si, comme on va le voir, le livre souffre de multiples défauts, il ne tombe pas dans le néopaganisme et ne se contente pas non plus que recycler les vieilles hypothèses d’Alexandre Afanassiev.

    Cependant, cette volonté de faire neuf, et presque tabula rasa, a un prix. Ainsi les auteurs regroupent dans l’«École mythologique», qu’ils rejettent, aussi bien Alexandre Afanassiev et Alexandre Famintsyne pour le XIXsiècle et l’académicien soviétique Boris Rybakov pour le XXe, ignorant une foule d’autres auteurs autrement plus sérieux. Du coups les hypothèses de cette école sont un peu légèrement qualifiées de «fantasies» (p. 3).

    Dès leur introduction, les auteurs basent leur travail sur un a priori surprenant: ils déconnectent la religion et le culte de la mythologie proprement dite, considérant que les premiers sont issus d’une évolution récente, lourdement influencée par le christianisme. Or sur ce point, ils ne démontrent rien, et n’auraient rien à répondre, par exemple, à Bernard Sergent qui avaient montré la grande proximité existant entre le culte de Svantovit à Arkone et celui d’Apollon à Sparte, rapprochement qui démontre l’antiquité du premier (Revue de l’Histoire des Religions, 1994, 211-1, p. 15-58).

    On entre dans le vif du sujet avec le chapitre 2 (p. 20-30), qui présente un bref, trop bref survol des sources supposées les plus anciennes sur la religion des Slaves: chaque texte est traduit puis suivi de quelques considérations dans lesquelles la bibliographie critique est quasiment absente. Et l’a priori signalé ci-dessus fait dire aux auteurs: «However, the belief in ‘one god’ that Procopius attributed to the Slavs is a typically Christian ‘monotheistic’ interpretation of primitive religions without a developed polytheistic pantheon of gods […]» (p.31).

    C’est là prendre le texte de Procope bien trop au pied de la lettre, car si celui-ci parle bien d’un « dieu unique », c’est pour ajouter ensuite: «Ils adorent en outre les fleuves et les nymphes et d’autres divinités et pendant ces sacrifices ils font des divinations» (Procope, De Bello gothico, III, 14 = Meyer, 1931, p. 5). On serait plus en droit de soupçonner que l’auteur byzantin a pu faire allusion à une forme d’hénothéisme.

    Autre a priori préjudiciable: selon les auteurs, il n’y aurait pas de panthéon commun à l’ensemble des Slaves. C’est là une assertion curieuse, même s’il est vrai que les noms de divinités attestés les sources textuelles ou la toponymie dans l’ensemble du monde slave (Perun, Veles, Mokoš), sont rares. Cette rareté peut vouloir dire que les Slaves, comme par exemple les Celtes, ont usé d’épithètes locales pour désigner leurs dieux. Mais s’en tenant à leur a priori, les deux auteurs en viennent à affirmer que si, par exemple, le dieu Svarožič est mentionné tant chez les Slaves de l’Ouest, que dans une source russe, c’est que l’auteur de cette dernière l’a emprunté à des sources occidentales (p. 49). Suivant cette même logique, Svarog ne serait qu’un fantôme, basé sur Svarožič, servant à traduire Hephaistos dans l’adaptation slavonne de la Chronique de Jean Malalas. C’est malheureusement ignorer d’autres sources, qui montrent l’existence d’un Svarok, anthroponyme en Bulgarie au XIIIe-XIVsiècle, ou encore d’un Suarunas, mercenaire slave attesté par Agathias (Histoires, IV, 18), deux noms vraisemblablement basés sur celui du dieu. Enfin, divers toponymes conservent sans doute encore la mémoire de Svarog : Swarożyno siodło et Twarożna góra en Pologne, Tvarožna en Bohême et en Moravie, Twarog en Styrie, la substitution de l’initiale et son remplacement par un «t» relevant sans doute d’un tabou.

    Cette même idée d’éclatement complet du panthéon slave fait dire aux auteurs que «the identification of Prove with the East Slavic Perun is without foundation» (p. 63), ceci sans le moindre argument à l’appui. Or il existe deux variantes dans le texte de la Chronica Slavorumd’Helmold, l’une d’elle nomme le dieu Prove et l’autre Prone. Or «Prone» peut aisément être accepté comme une forme germanisée de Perun. En atteste un toponyme de la région de Stralsund, Prohn, écrit Perun en 1240. Perun n’est pas seulement un dieu des Slaves de l’Est, mais bien un dieu pan-slave: à défaut de textes, il est connu dans l’ensemble du monde slave par la toponymie. Ce simple fait suffit à montrer que Perun était aussi connu des Slaves de l'Ouest.

    Aussi conclure cette importante partie consacrée au dieux par un «There was no pan-Slavic pantheon. All Slavic gods were purely local» sans appel est clairement abusif et démontre juste que les auteurs n’ont pas su s’affranchir des textes anciens pour aborder d’autres sources.

    La deuxième partie, consacrée au héros, porte assez mal son titre, «Heroes», puisqu’en définitive, elle ne traite que des mythes de fondation et des héros fondateurs, à l’exclusion des héros épiques (lesquels ne sont pas connus par des sources anciennes). Les auteurs notent avec raison la grande ressemblance qui existe entre les mythes de fondation des différents peuples slaves, dont ils dressent l'inventaire détaillé, et après avoir présenté les diverses sources, ils tentent une reconstruction audacieuse mais intéressante, n’hésitant pas à invoquer une forme de totémisme animal.

    Issu d’un cours professé récemment à Jérusalem, Slavic Gods and Heroes pose clairement problème par son manque d’ambition et son caractère trop péremptoire: les analyses y sont bien trop brèves et ne s’appuient pas assez sur la bibliographie pourtant importante. On constatera ainsi des lacunes flagrantes: Roman Jakobson est ignoré, un seul ouvrage de Vjačeslav Ivanov et Vladimir Toporov est mentionné, les publications récentes de sources ne sont pas connues. On relève aussi une erreur étrange: Religia Słowian du Polonais Andrzej Szyjewski (2003, Kraków, WAM), est systématiquement cité sous un titre anglais, alors qu’il semble que cet ouvrage n’ait jamais été traduit. Malgré tous ces défauts, il ne s'agit pour autant pas d'un livre indigne, en regard de ce qui existe autrement en anglais. 

    Patrice Lajoye

  • (Review) Galina Kabakova - D'un Conte l'autre

    Kabakova.jpgGalina Kabakova, D’un Conte l’autre, 2018, Paris, Flies France, 255 p.

    Galina Kabakova est sans doute à l’heure actuelle la meilleure spécialiste en activité du folklore des Slaves de l’Est. Depuis de nombreuses années, elle dirige une collection fameuse, «Aux origines du monde», chez Flies France, consacrée aux mythes et légendes cosmogoniques et étiologiques du monde entier, et parallèlement à cette activité, elle a publié de nombreux articles sur les mythes étiologiques d’une part, et sur les contes des Slaves de l’Est d’autre part. Ce sont ces articles qui sont pour partie rassemblés, revus et ordonnés selon un plan remarquablement cohérent, dans le présent ouvrage, qui porte pour le coup un titre que l’on pourra sans doute trouver trop vague mais qui pourra amener vers lui des lecteurs qui autrement ne se seraient peut-être pas intéressés à ce folklore.

    Bien que non clairement scindé en parties, le sommaire se divise en deux ensembles : les premiers articles, en gros les deux tiers de l’ouvrage, portent sur les mythes étiologiques, tandis que les derniers traitent des contes russes.

    Le premier ensemble s’ouvre donc logiquement par une reprise de la préface des actes d’un colloque organisé en il y a quelques années à la Sorbonne, Contes et légendes étiologiques dans l’espace européen (publiés en 2013 chez Pippa / Flies France), avant d’enchaîner sur dix articles qui traitent chacun d’un type précis de conte étiologique, avec une orientation plus spécifiquement slave pour les trois derniers («Les insectes dans les légendes slaves orientales», «Les conte explicatifs russes» et «Le corps humain dans les étiologies russes»). Chacun de ces articles donne une vue analytique détaillée du motif étudié (par exemple «La création de l’étranger»), mentionnant l’aire de répartition, la fréquence du conte dans telle région donnée, les variations de motifs, sans forcément cependant tirer de conclusions sur les raisons de cette répartition. Ce qui intéresse plus l’auteur n’est pas l’origine du conte, mais l’étude de sa variabilité.

    Les cinq derniers articles, consacrés exclusivement au folklore russe, ont des thèmes plus divers. «Baba Yaga dans les louboks» nous montre comment la fameuse sorcière a été traitée dans les gravures populaires, un traitement différent de celui de la littérature orale contemporaine. «Classer les contes russes» offre un bref mais utile survol historiographique du sujet. Les deux articles suivant («Les aventures du conte russe dans la Russie soviétique» et «L’image du pays de cocagne dans le folklore soviétique»), montre le traitement qui était fait au conte en URSS. Le premier montre de quelle manière le conte merveilleux a été considéré au fil du temps, des années 1920 à la chute de l’URSS, tandis que le second s’intéresse à quelque chose de singulier : le folklore soviétique, un fake-lore, reprenant les manières du folklore authentique, mais avec pour héros un Lénine devenu un quasi-demi-dieu. Le dernier article traite enfin d’un sujet très important dans le domaine de la culture soviétique : celui du cinéma. En effet, si la littérature (en dehors de celle destinée aux enfants) se devait d’être réaliste, il existe de très nombreux films adaptant des contes populaires merveilleux. Certes, ces films sont très «prolétarisés», mais la magie est toujours au rendez-vous.

    D’un Conte à l’autre constitue au final un recueil très cohérent, synthèse de travaux qui sont toujours en cours, et en même temps porte d’entrée utile vers des domaines qui sont encore bien négligés en France : l’étude des mythes étiologiques d’une part, et de la mythologie et du folklore slave d’autre part.

     

    Patrice Lajoye