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NMC

  • Mythologie celtique / Celtic Mythology 1

    Nous sommes heureux de vous annoncer la parution du nouveau volume de notre collection "Bibliothèque de Nouvelle Mythologie Comparée": Mythologie celtique / Celtic mythology 1, dirigé par Guillaume Oudaer et Patrice Lajoye.

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    17 auteurs ont répondu à l'appel, nous permettant de proposer un sommaire qui couvre tous les champs des études celtiques.
    Pour recevoir cet ouvrage, vous pouvez nous faire un virement via Paypal de 40€, à l'adresse lviktoriya@aol.fr , ou bien nous envoyer un chèque français du même montant à l'ordre de Viktoriya Lajoye (22A rue de la Gare, 14100 Lisieux).
     
    We are pleased to announce the publication of the new volume in our "Library of New Comparative Mythology" collection: Mythologie celtique / Celtic Mythology 1, edited by Guillaume Oudaer and Patrice Lajoye.
    Seventeen authors responded to the call, allowing us to offer a table of contents that covers all areas of Celtic studies.
    To receive this book, you can send us a PayPal transfer of €40 to lviktoriya@aol.fr, or send us a French check for the same amount made payable to Viktoriya Lajoye (22A rue de la Gare, 14100 Lisieux, France).
     
    Table des matières / Table of Contents
     
    Claude Sterckx, Avant-propos / Foreword
    Martin Schönfelder, Sanctuaires et dieux de la culture de La Tène. Un aperçu et de nombreuses questions
    Winfried Kumpitsch, Mercurius Tourenus or Toutenus. An epigraphical reassessment
    Patrizia de Bernardo Stempel, A Fresh Look at the Mother Goddesses known as Matres and Matronae
    Audrey Ferlut, Abnoba, une interprétation de Diane ? 
    Daniel Gricourt et Dominique Hollard, La Vénus gallo-romaine « à la chouette ». Un héritage celtique
    Patrice Lajoye, An ancient Celtic rite in the work of Jonas de Bobbio? Saint Columbanus and the storm
    Tiziana Soverino, Macha, Navan Fort, and The Couvade. A Goddess, a Sanctuary, and a Public Rite 
    Phillip A. Bernhardt-House, “Pig-Tales” in the Mythological Lineages of Lleu and Lug
    Gaël Hily, Le panthéon irlandais selon Cormac mac Cuilennáin
    Philip Thornhill, River-deity to martyr-king Tewdrig of Mathern (or to brutal tyrant: Teudar of Cornwall)
    Guillaume Oudaer, La topogonie d’Emain Macha, la construction du Fort de Bres et leurs équivalents grecs et scandinaves
    John Waddell, The magic of Goibniu
    William Sayers, The Afterlife of Celtic Sovereignty Figures and Legendary Kings in Medieval Icelandic Literature
    Alexandr Mourashov, The female Sovereignty figure in the Grail romances : puella senilis and the Loathly Damsel
    Frédéric Kurzawa, Trois messagères de la mort : la bean sí irlandaise, la bean-nighe écossaise et la gwrach-yrhibyn galloise
     
  • (Review) Jiří Dynda – Slavic Paganism in Medieval Christian Writings

    dynda.jpgJiří Dynda, Slavic Paganism in Medieval Christian Writings. Ink, Cross, and Pagan Gods, 2025, Leiden, Brill

    On assiste depuis quelques années à un renouveau de publications en anglais de travaux importants sur la mythologie et la religion des Slaves païens. Citons par exemple le recueil de sources édité sous la direction de Juan Antonio Álvarez-Pedrosa1 ; l’essai sur les rituels par Juan Antonio Álvarez-Pedrosa et Enrique Santos Marinas2, celui sur la religion des Slaves de l’Ouest selon les sources allemandes par Stanisław Rosik3. Le chercheur tchèque Jiří Dynda s’insère maintenant dans ce courant, après avoir publié quelques excellents articles ainsi que de remarquables monographies en tchèque. Le présent ouvrage est en quelque sorte une synthèse mise à jour issue de deux de ces monographies4.

    Son angle d’étude est original : il ne s’agit en effet pas d’un livre qui traite directement de la mythologie slave, mais plutôt du regard que les auteurs chrétiens ont eu sur cette mythologie. En effet, à la différence d’autres peuples christianisés tardivement, tels que les Irlandais ou les Scandinaves, les Slaves n’ont pas écrit directement sur leur propre mythologie, et si l’on fait exception des textes de la Rus’ kyivienne, toutes les sources contemporaines des faits sont dues à des auteurs chrétiens non-slaves. Il convient donc d’examiner attentivement ces sources et d’identifier leurs éventuels biais avant de les employer dans des études mythologiques. Ainsi, Slavic Paganism in Medieval Christian Writings s’ouvre sur une introduction méthodologique remarquable montrant les différentes façons qu’ont eu les auteurs chrétiens d’interpréter les divinités païennes : évhémérisme, interpretation classica, interpretatio daemonica, et sur les diverses façons qu’on eut ensuite les chercheurs de lire ces auteurs. Cette introduction mérite clairement d’être lue pour elle seule : elle peut s’appliquer à bien d’autres domaines, par exemple l’Irlande ancienne, où là aussi toutes les sources sur la religion et la mythologie sont chrétiennes.

    Le livre lui-même se scinde en trois parties qui séparent les textes non pas vraiment du point de vue chronologique ou géographique, mais du point de vue du but qu’ils visent. Dans la première partie, il est ainsi question des récits qui relatent la christianisation des derniers slaves, quand ces récits sont contemporains ou immédiatement postérieurs à cette christianisation. Le paganisme y est donc vu comme un ennemi extérieur (« Paganism as an External Enemy), car les auteurs sont tous germaniques. Cela n’empêche pas des différences entre ceux-ci. Thietmar voit les païens comme des apostats, Adam de Brême se veut plus objectif, Helmold observe les choses directement sur le terrain, tandis que les biographes d’Otto de Bamberg recueillent les paroles de ceux qui ont accompagné le missionnaire dans son travail. À cela s’ajoute le fait que cette christianisation s’est opérée différemment selon les endroits : si la Poméranie a été christianisée via des missions qui se sont déroulées plus ou moins pacifiquement, ailleurs, il y a eu une véritable croisade, parallèle à la Seconde Croisade prêchée par Bernard de Clairvaux, dont les visées étaient clairement exterminatrices.

    La seconde partie aborde des sources qui ne sont pas nécessairement plus récentes, mais qui présentent ce processus de christianisation comme achevé. Il s’agit pour l’essentiel de chroniques du Moyen Âge central et du bas Moyen Âge, ainsi que de quelques textes hagiographiques dont les données relèvent le plus souvent du cliché. Seules les chroniques ont finalement un intérêt réel car elles préservent parfois des fragments de mythologie, fragments qu’il faut cependant toujours aborder en ayant à l’esprit que les auteurs ont une culture savante, inspirée d’œuvres chrétiennes ou classiques.

    Enfin la troisième partie aborde les textes qui présenteraient de supposées survivances du paganisme après la christianisation. Ici, Jiří Dynda invite à se réapproprier le terme de « syncrétisme ». Pour lui, la religion qui apparaît après la christianisation, en incorporant des éléments païens, souvent au prix de transformations importantes, forme un nouveau système cohérent, et non un simple empilement de strates hétéroclites. Il s’oppose avec vigueur, et avec raison, au concept de « double foi » (dvoeverie) : le terme n’apparaît que dans un seul sermon médiéval, et il sert à décrire qui semble n’être ni plus ni moins que la religion populaire d’alors, et non une persistance secrète du paganisme aux côtés du christianisme. De la même manière, les pages que l’auteur consacre à l’examen du cas de Rod et des Rožanicy sont un modèle d’examen critique.

    L’auteur insiste au fil des pages sur la possibilité d’une forme d’hénothéisme chez les Slaves : l’idée est intéressante et a le mérite d’expliquer certaines choses, comme le fait que, d’une tribu à l’autre, le dieu principal ne semble pas être le même, alors qu’on sait qu’il y a eu des divinités communes à l’ensemble du monde slave. C’est une situation qui, finalement, n’est guère différente de celle des Celtes antiques : on sait que chez ceux-ci, il y avait un grand dieu, maître du panthéon, assimilé à Jupiter après la conquête romaine, mais cela n’a pas empêché chaque cité de vouer un culte à un dieu particulier (ainsi, les Trévires vénèrent principalement Mars Lenus). De même qu’en Grèce Zeus est maître du panthéon, mais c’est à Athéna que l’Attique voue un culte particulier.

    Un détail finalement dans ce livre ne m’a pas convaincu : je ne pense pas que Prove, dieu mentionné chez les Obodrites, existe. Une variante propose la forme « Prone »5, et il me semble que c’est celle-ci qu’il faut prendre en compte : Prone pourrait bien en effet n’être, comme je l’ai écrit dans ma thèse, qu’une prononciation germanique de Perun, ce qui change alors tout pour ce qui concerne la hiérarchie locale des dieux.

    Mais au-delà de cette petite remarque, il faut bien garder à l’esprit que le livre de Jiří Dynda est un ouvrage remarquable, important, dû à un auteur qui a les capacités intellectuelles d’interroger les sources, quelle que soit leur langue, parfois immédiatement dans leurs manuscrits, et donc de les critiquer utilement. Tout cela sans verser dans l’hyper-criticisme : au contraire, l’auteur y reste ouvert au comparatisme. Slavic Paganism in Medieval Christian Writings est donc une belle œuvre.

     

    Patrice Lajoye

    1Juan Antonio Álvarez-Pedrosa (dir.), Sources of Slavic Pre-Christian Religion, 2020, Leiden, Brill. Cet ouvrage fait suite à une première version publiée en espagnol en 2017.

    2Juan Antonio Álvarez-Pedrosa and Enrique Santos Marinas, Rituals in Slavic Pre-Christian Religion. Festivals, Banqueting, and Divination, 2023, York, Arc Humanities.

    3Stanisław Rosik, The Slavic Religion in the Light of 11th- and 12th-Century German Chronicles (Thietmar of Merseburg, Adam of Bremen, Helmold of Bosau), 2020, Leiden, Brill.

    4Jiří Dynda, Slovanské pohanství ve středověkých pramenech, 2017, Prague, Scriptorium ; Jiří Dynda, Slovanské pohanství ve středověkých ruských kázáních, 2019, Prague, Scriptorium.

    5C’est d’ailleurs celle-ci que Juan Antonio Álvarez-Pedrosa et son équipe retiennent, considérant que Prove peut être une cacographie pour Prone.

  • (Review) Francesca Prescendi – Lupae. Présences féminines autour de Romulus et Rémus

    Capture2.jpgFrancesca Prescendi, Lupae. Présences féminines autour de Romulus et Rémus, 2024, Turnhout, Brepols, coll. « Generation Bodies and Gender in History, 4 ».

     

    Le fait que cet ouvrage soit paru dans une collection qui se proclame ouvertement féministe et qu’il porte en exergue une citation «il nostro è un mondo fabbricato dagli uomini, la loro dittatura è così antica… e tutti i loro eroi sono maschi» découragera peut-être certains, qui le rangeront sans plus sous l’étiquette jugée infamante de gender studies et se dispenseront de le lire. Ils auraient certainement tort, car ce petit livre ouvre des pistes de réflexion très intéressantes sur des questions débattues depuis toujours. Ajoutons qu’il est de lecture agréable et que ses petites dimensions ne l’empêchent pas de s’appuyer sur une riche bibliographie, fondée sur les travaux les plus récents, en même temps que sur une attrayante iconographie, qui souvent enrichit le propos par des analyses originales (ainsi pour l’identification, fig. 11, p. 52, d’un détail de la fresque de Pompéi, comme révélant la référence à la version rare de la précipitation dans le fleuve – que ce soit le Tibre ou l’Anio – de la mère des jumeaux). S’agissant de présences féminines dans la légende des origines de Rome, on aurait pu s’attendre à voir longuement traitée la question de l’enlèvement des Sabines, qui marque l’achèvement de la formation de la cité, où l’élément féminin a dès lors sa place au même titre que l’élément masculin, et son entrée dans le concert des nations, mais l’autrice ne fait que l’évoquer en passant (p. 20-22), sans insister, comme on aurait pu s’y attendre dans une optique étroitement féministe, sur le caractère de viol de l’épisode mais en dégageant, à juste titre, son rôle de passage d’un stade où la violence fait place à l’ordre, la transgression aux mores. Francesca Prescendi s’attache en revanche, dans trois chapitres successifs, «Focus sur les mères des jumeaux», p. 31-69, «Lait fondateur: la louve, le figuier et la déesse», p. 71-100, «Acca Larentia, une ancêtre bienfaitrice», p. 101-127), à trois figures qui ont leur place dans le début de la légende, deux femmes, la mère des jumeaux (avec une bonne présentation, p. 32-36, de la question de ses différents noms, Ilia et Rhéa Silvia) et la compagne du berger Faustulus, qui joue le rôle de mère nourricière, et, entre les deux, l’animal femelle qui, à la place de la mère biologique immédiatement éliminée et en attendant qu’ils soient allaités par Acca Larentia, nourrit de son lait les deux enfants qui connaissent à leur naissance, comme tant de héros, une phase de rejet au sein du monde sauvage. S’agissant de la mère des jumeaux, l’autrice prend ses distances par rapport à une explication purement historique du statut servile attribué au personnage dans la légende de Promathion, qui a fréquemment été expliqué comme une projection de la figure du roi Servius Tullius, dans la légende des origines de roi Servius Tullius (p. 57-69), et estime qu’il a pu relever d’une ancienne de la vision du personnage (p. 57-69, et conclusion générale p. 130) ; elle ne fait pas intervenir de considérations comparatives comme celles que nous avons reprises à la suite de Georges Dumézil sur l’ancienneté de la version où les enfants naissent d’une divinité masculine du foyer (et se tient à la version classique faisant du dieu Mars leur père), mais il est clair que celles-ci vont dans le sens d’une substitution comme procréatrice des jumeaux d’une servante à la fille d’un roi. Dans le deuxième chapitre, la thématique du lait ne permet pas seulement à l’autrice de faire intervenir les deux types d’êtres femelles que sont la louve et Acca Larentia, mais également le figuier, dont la sève blanche était désignée elle aussi par le terme lac et dont le fruit a la forme d’un sein féminin: cela donne lieu à de suggestives réflexions non seulement sur la déesse Rumina comme divinité agissant sur la mamelle, mais même sur l’«interspécisme» qui caractérise la légende, où se côtoient dans un rôle de donneuses de lait, une femme, Acca Larentia, une bête, la louve, et une plante, le figuier (p. 95-98) – ainsi que, plus classiquement, à des considérations sur le caractère réputé primitif de l’offrande de lait par rapport à celle de vin. Le dernier chapitre se recommande par la manière, à nos yeux définitive, dont il balaie la vieille discussion, initiée en 1871 par Theodor Mommsen, sur «die echte und die falsche Acca Larentia», à propos des deux Larentia que nous font connaître les textes, la femme qui recueille les jumeaux et la courtisane aimée d’Hercule. Francesca Prescendi rappelle que l’argument de l’antériorité de la figure de prostituée sur celle de la nourrice des jumeaux ne tient plus à partir du moment où on ne rejette plus le témoignage de l’Origo gentis Romanae comme on le faisait au xixe siècle et insiste à juste titre sur les analogies des deux Larentia, le même métier de lupa étant attribué à la seconde qu’à la première, ainsi que, dans certaines versions, le don qu’elle aurait fait à sa fortune au peuple romain. L’autrice se livre à une étude remarquable des diverses strates de la légende, mettant en relief le rôle de Caton, Valerius Antias, Licinius Macer, Verrius Flaccus, Plutarque (p. 113-119). On la suivra sans réserve dans l’idée que la réputation de lupa attribuée à la mère nourricière de Romulus et son frère n’est pas le produit d’une rationalisation secondaire du motif de la louve, mais de la nature même du personnage, qui faisait de l’animal et de la femme des doubles l’un de l’autre, tous deux connotés par leur marginalité.

     

    Dominique Briquel