Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Marcel Meulder - Réponse à Michaël Tonon

Réponse à Michaël Tonon

 

Marcel Meulder

 

Je remercie mon contradicteur pour les exemples de morts trifonctionnelles qu’il m’a fait connaître dans le monde celtique et médiéval notamment, et pour les objections émises à l’encontre de mon hypothèse. Celles-ci, à mon très humble avis, ne me paraissent pas tenir compte de la spécificité du monde grec, par rapport aux autres Indo-Européens (contact avec le Proche-Orient, comme l’a montré M. L. West par exemple). Ces spécificités font que par exemple le poète devenant héros – c’est le cas d’Hésiode – est frappé par une mort violente (ainsi p. 6-8), et non par une punition de première fonction, bien que le poète semble être en relation avec cette fonction – c’est le cas d’Hésiode avec sa Théogonie et son plaidoyer pour la justice, ainsi dans Les Travaux et les Jours. Auteur présumé d’un viol, Hésiode est jeté, mort, par ses meurtriers, dans la mer – et l’on pourrait y voir une allusion à un châtiment de troisième fonction qu’est la noyade. Comme le poète remplit une fonction proche de la première fonction, il me semble normal que les dieux, et notamment Poséidon « le saint patron » du village d’Ascra en Béotie d’où est originaire Hésiode, vengent la mort de leur « protégé », d’autant plus que ce dernier entretient, semble-t-il, bien plus de liens avec Delphes (et Apollon) que son concurrent Homère dans le fameux Certamen (p. 22). Il est évident que reconstituer celui-ci est une œuvre intellectuelle, car il s’agit de réunir ce qui est épars, des membra disiecta d’une « histoire », répartis entre l’origine orchoménienne, Aristophane, Alcidamas, Eratosthène et Plutarque, des auteurs d’époques différentes et aux buts différents. Ainsi pour Eratosthène, il était plus « normal » qu’une femme déshonorée se pende (une tradition féminine bien grecque, comme le soulignait avec cynisme Diogène), au lieu de se noyer.

Au lieu d’entamer un « certamen » avec mon contradicteur (les sophistes de l’époque de Socrate et Platon eussent dit « des dissoi logoi » !), je préfère laisser aux lecteurs et aux spécialistes (en ces temps troublés, nous sommes si peu nombreux) de forger leur jugement et d’extraire de nos divergences la quintessence pour faire progresser nos sciences humaines et humanistes.

Je remercie mon contradicteur, car dans les 38 pages que j’ai consacrées à cet aspect du Certamen, j’eusse dû mettre plus en valeur la façon dont les Grecs ont retravaillé leur héritage indo-européen : j’en tire comme conclusion que toute recherche est imparfaite, et c’est heureux pour les progrès de l’humanité.

Les commentaires sont fermés.