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(Review) Jean-Loïc Le Quellec - Jung et les archétypes. Un mythe contemporain

Jung.jpgJean-Loïc Le Quellec, Jung et les archétypes. Un mythe contemporain, 2013, éditions Sciences Humaines, Auxerre (France)

 

Nous sommes quelques-uns ici, participant à Nouvelle Mythologie Comparée, à ne pas admettre la notion d'archétypes, qui nous semble non-démontrée. J'ai pu mettre en évidence que le mythe de l'homme cosmique, par exemple, n'en est pas un : il est d'origine indo-européenne et s'est répandu par la suite en Asie, jusqu'à atteindre des régions parfois fort éloignées. De même, Jean-Loïc Le Quellec a accompli le même travail sur l'ouroboros, travail qui a par ailleurs intégré le présent ouvrage sous la forme d'un chapitre particulier.

Si cette notion a été particulièrement mise en avant par des mythologues comme Joseph Campbell ou Mircea Eliade, son principal promoteur -souvent considéré comme son inventeur – est Carl Gustav Jung. Autant dire qu'une étude sur ce personnage, axée sur les archétypes, s'avère nécessaire.

Jean-Loïc Le Quellec commence par interroger la notion d'archétype elle-même, par en chercher la définition exacte – laquelle s'avère particulièrement fluctuante d'un auteur à l'autre, y compris chez Jung lui-même. Il remonte à l'Antiquité grecque, où le terme apparaît déjà, notamment chez Platon, qui en fut le premier vrai théoricien – un théoricien singulièrement absent de l'oeuvre de Jung. Malgré le fait qu'elle ne soit pas le moins du monde démontrée, cette notion est malgré tout rapidement devenue comme une sorte de credo (chapitre 5), qu'il n'est justement plus nécessaire de démontrer. Pourtant, très tôt des voix se sont élevées, notamment chez les ethnologues, mais aussi dans d'autres branches des sciences : ainsi l'éthologue Konrad Lorenz, pourtant invoqué parfois par les jungiens, a dès 1950 montré que « sa théorie de l' 'archétype' se révèle à l'expérience inexacte ».

Malgré ces réserves, jamais Jung ni ses continuateurs ne se remettront en cause, au contraire, le psychanalyste continuera sans cesse à creuser dans cette voie, invoquant de nouveaux archétypes, tentant une expédition « ethnologique » au Kenya dont la description fait plus penser à Tartarin de Tarascon chassant le lion plutôt qu'à une vraie expédition scientifique. Mais il y a pire : il apparaît au fil des pages que Jung a sciemment déformé certaines informations qu'il a mises à son profit. Jean-Loïc Le Quellec, à ce sujet, est prudent, s'étant attaqué d'abord à l'œuvre avant d'essayer de comprendre l'auteur, le mot « mensonge » n'apparaît clairement sous sa plume qu'à la page 177. Car mensonges il y a. Notamment lorsque Jung raconte, à plusieurs reprises durant sa carrière, le rêve qui lui aurait permis d'élaborer sa théorie des archétypes : un rêve qui n'apparaît jamais de la même manière d'une version à l'autre. C'est alors qu'il faut s'intéresser à la personnalité de Jung elle-même, essayer de comprendre pourquoi et comment a-t-il pu soutenir coûte que coûte cette théorie. Si Jean-Loïc Le Quellec s'adresse finalement peu aux années de jeunesse de Jung, à sa relation avec Freud – et on peut parfois le regretter, car il y a peut-être là une clé de compréhension de son antisémitisme –, il montre cependant que ses positions sur l'inconscient collectif et les archétypes l'ont amené à avoir un comportement pour le moins ambigu lors de la monté du nazisme. Jung semble avoir vécu Hitler et les nazis comme une résurgence d'un « archétype de Wotan », archétype construit sur rien de scientifique, mais au contraire élaboré en tordant les connaissance d'alors sur la mythologie germanique de façon pour le moins surprenante, voire irrationnelle. Si Jung s'est par la suite défendu de toute connivence avec le nazisme, il n'en reste pas moins que l'épisode est intéressant pour montrer, une fois encore, la nullité de la théorie des archétypes.

On pourra regretter alors quelques petites erreurs qui émaillent le livre de Jean-Loïc Le Quellec. Dès la première page, il n'est pas question du centenaire de la mort de Jung, mais de son cinquantenaire. P. 182, il fait de Camille Flammarion un proche de la Société théosophique (la théosophie, autre fléau de la mythologie comparée) : ça n'est pas du tout certain, même si cela est écrit partout. Selon Vsevolod Soloviev, qui fut membre de la société, Flammarion ne serait venu qu'une seule fois chez Mme Blavatsky et en serait reparti sans éprouver le moindre intérêt.

Autre erreur, plus importante : p. 232 et 327, Jean-Loïc Le Quellec inverse la deuxième et et la troisième fonction dumézilienne. Ce n'est pas la troisième fonction qui est liée à la guerre, mais la deuxième.

Mais ce ne sont-là que broutilles, tant à côté de cela l'ouvrage est salutaire. Il vient en effet à point, après les critiques de Campbell par divers ethnologues et anthropologues (Northup, Cosentino, Crespi, Dundes, etc.), puis d'Eliade notamment par Dubuisson : il était temps de remonter à l'une des sources de ces errances, Jung lui-même, dont le travail concernant les mythes n'avait finalement rien de scientifique.

 

Patrice Lajoye

Commentaires

  • Monsieur Lajoye ne connait pas bien l'oeuvre de Jung et encore moins celle de ses continuateurs. J'imagine la raison vient du fait que les oeuvres n'ont pas toutes ete traduites en francais.(Excusez, j'ecris sur un clavier anglophone).
    Concernant Platon, il trouvera dans l'index general, volume XX du texte anglais sur les pages 527 et 528 presqu'une centaine de references. Certes, Jung change ou develope ses idees a maintes reprises. Pour moi, Patrice Lajoye fait preuve de prejuge et peut-etre de mauvaise foi.

  • Donc Jung est antisémite, propos soutenu par nombre de ceux qui conteste ses thèses. Le problème est que, si la théorie des archétypes n'a jamais été prouvée, ce que nul ne conteste (c'est, pour Jung, une hypothèse), l'antisémitisme supposé de Jung a, lui, été prouvé comme tout à fait inexact.

    L'hypothèse de l'archétype est une hypothèse scientifique, et non une Vérité scientifique, du simple fait que, de Vérité, seules les religions en proposent. Une hypothèse scientifique ne se juge pas à l'aune de sa Vérité supposée, mais de sa pertinence au regard des faits dont elle cherche à rendre compte ; ici, en l'occurrence, de faits cliniques. Jung ne s'est pas intéressé à la mythologie et à l'anthropologie en tant que mythologue ou anthropologue, mais uniquement en tant que clinicien, d'où certaines approximations que nul ne conteste.

    C'est probablement la raison principale qui l'a conduit à donner de l'archétype de nombreuses définitions dont certaines sont en contradiction avec d'autres. Mais rendre compte d'une réalité complexe (au sens que la physique donne aujourd'hui à ce terme), ne se peut avec une théorie simple (linéaire au sens de la physique). Jung n'avait pas lu Edgar Morin (il est mort avant), mais il eut probablement été en plein accord avec lui sur la question de l'épistémologie.

    Il est vrai que Jung peut donner à penser, et que c'est, comme de nombreux auteurs du champ psychanalytique, l'un de ses intérêts majeurs. Certains, cependant, n'aiment pas penser. À eux, les Vérités sont préférables aux questions posées par une pensée qui cherche, propose, et ouvre toujours plus de questions qu'elle n'offre de réponse. C'est le cas de Jung, après Freud, et de la psychanalyse en général.

    À lire le commentaire de Patrice Lajoye je ne peux donc que me dire que voilà un nouveau livre à mettre sur le compte des nombreux pamphlets qui, depuis la science des rêves de Freud, n'ont cessé d'être publiés contre la psychanalyse, qu'elle soit de Jung, Lacan, ou Freud lui-même.

  • Bonjour,

    Je voudrais rappeler aux deux commentateurs ci-dessus, que si j'adhère aux idées du livre, je n'en suis pas l'auteur (qui est Jean-Loïc Le Quellec) et que donc les critiques doivent lui être adressées en premier.
    Pour ce qui est de la démonstration de la non-validité de la théorie des archétypes, vous pourrez en trouver un exemple fort simple et argumenté ici-même.
    http://nouvellemythologiecomparee.hautetfort.com/archive/2013/05/16/jean-loic-le-quellec-l-ourovore-et-les-symboles-universels.html

    Et quoi qu'il en soit, avant de me taper dessus alors que je ne suis que recenseur du livre, je vous invite tout simplement à le lire. Merci d'avance.

  • Merci de votre réponse. Elle montre bien que vous prenez la notion d’archétype d’un point de vue anthropologique et non psychologique, ce qui, évidemment, change la donne. Elle montre aussi que vous partez d’une approche singulière de cette notion, celle d’Erich Neumann, centrée autour d’un seul exemple, l’ourobouros, ce qui vous permet d’éviter d’avoir à entrer dans la complexité de la notion développée de bien d’autres points de vue, complémentaires, par son auteur, C.G. Jung. Prendre ainsi un concept au sein d'un système de pensée, dans un champ précis, ici la psychologie, et le critiquer isolément en l'approchant au sein d'un champ d'une toute autre nature, est-ce intellectuellement satisfaisant ? En tout cas pas pour moi.

    Ce que démontre le texte que vous m’avez indiqué, c’est que l’extrapolation des données d’un domaine (la psychologie analytique) dans un autre (l’anthropologie) est à éviter. Jung n’a pas été exempt de ce travers, et je vous accorde qu’il est bien possible que le concept d’archétype n’ait aucune valeur dans le champ de l’anthropologie, domaine où je n’ai aucune compétence. Mais quand la critique s’autorise le même travers, elle s’expose au même jugement.

    Un dernier mot : je ne répondais pas à un livre que je n’ai pas lu, mais bien à son commentateur. Et, comme je l’ai dit, il est vrai que votre commentaire ne va pas m’inciter à lire cet ouvrage. D’autres peut-être éveilleront ma curiosité ?

  • Il est désolant que des "lecteurs" mettent à ce point en pratique la maxime d'Oscar Wilde «je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique : on se laisse tellement influencer.»

  • Merci Messieurs de votre attention. Il est vrai que je n'ai pas lu le texte de Professeur Le Quellec.J'ai essaye d'obtenir le livre a Paris la semaine derniere pendant un court sejour. Je suis rentree bredouille a Londres apres mes expeditions chez Gallimard et Gibert. Abe m'informe qu'il y a un exemplaire ou deux a La Rochelle!N'empeche, mes remarques au sujet de Platon sont valables.Nous attendrons donc, car cela m'interesse et peut-etre cette affaire des archetypes ne s'arrete pas la...

  • Merci d'avoir pris le temps de répondre. Je vous informe que le livre peut-être commandé, sous son édition papier ou sous forme de PDF, directement chez l'éditeur: http://editions.scienceshumaines.com/jung-et-les-archetypes-un-mythe-contemporain_fr-511.htm


    Par ailleurs, vous avez tout à fait raison, sur les deux points que vous évoquez:

    1/ Tous les textes de Jung ne sont pas disponibles en français, comme vous le remarquez, et j'ai donc eu recours aux éditions originales en allemand et en anglais (voire en espagnol!) à chaque fois que nécessaire. Bien sûr, je cite toutes mes sources, qui sont donc aisément vérifiables. Je consacre d'ailleurs plusieurs développements aux manipulations plusieurs fois opérées par les traducteurs de Jung (en anglais et en français) pour "améliorer" ses textes originaux ou pour les édulcorer. En tout cas, il me semble que vous avez été un peu rapide en parlant de "mauvaise foi" dans votre premier message.

    2/ Quant aux références à Platon dans l'index de l'édition anglaise de ses œuvres, la question est de savoir à quoi elles renvoient. Ce qui est intéressant, à propos des citations que fait Jung de Platon, c'est qu'il ne le mentionne pas lorsqu'il énumère ses sources sur la notion antique d'archétype, préférant citer nombre d'auteurs mineurs et largement postérieurs, et allant même jusqu'à affirmer que "le mot archétype […] remonte aux premiers siècles de notre ère"... ce qui est notoirement faux, puisque le terme apparaît sous la plume d'Empédocle au Ve siècle AVANT l'ère commune. Mais ce n'est là que l'une des innombrables erreurs de Jung et donc, effectivement, l'affaire ne s'arrête pas là.

    Source: Jung, Carl Gustav 1958d. Psychology and Religion: West and East (translated
    by R.F.C. Hull). New York: Pantheon Books, Bollingen Series XX (The Collected Works of C.G. Jung, vol. 11), 699 p. (p. 50).

  • Bonjour,

    Réponse à François Martin-Vallas.
    L'exemple de l'ourobore n'est qu'un exemple parmi d'autres mentionnés dans le livre. Encore une fois, lisez-le avant de lancer des formules lapidaires du type "centrée autour d’un seul exemple", car non, justement, ce n'est pas centré autour d'un seul exemple.
    Ensuite, vous écrivez:
    "Ce que démontre le texte que vous m’avez indiqué, c’est que l’extrapolation des données d’un domaine (la psychologie analytique) dans un autre (l’anthropologie) est à éviter. Jung n’a pas été exempt de ce travers, et je vous accorde qu’il est bien possible que le concept d’archétype n’ait aucune valeur dans le champ de l’anthropologie, domaine où je n’ai aucune compétence. Mais quand la critique s’autorise le même travers, elle s’expose au même jugement."
    Mais justement: Jung a bâti sa notion d'archétype en extrapolant des données (mal maîtrisées par ailleurs) d'un domaine (l'anthropologie) dans un autre (la psychologie analytique). Sa démarche était biaisée d'emblée, par le fait qu'il ne connaissait que mal l'anthropologie, ce que montre bien sa tentative ridicule de safari dans l'est africain. Autrement, il part d'idées fausses ou biaisées. Est-ce là une démarche scientifique? Assurément non. C'est d'ailleurs – je dis cela de mémoire, ma lecture du livre remontant déjà à bientôt un an – une chose que Jung finissait par admettre, que sa démarche relevait plus du religieux que du scientifique.
    Mais encore une fois, ce travail n'est pas de moi, et, quitte à me répéter, je ne peux que vous conseiller de livre cette étude: vous ferez ainsi preuve vous même d'une saine curiosité scientifique, et non de dogmatisme.

  • Merci de votre réponse. Je répète cependant que je ne commente pas un livre que je n’ai pas lu, et que je n’ai, aujourd’hui, pas l’intention de lire. Je commente la recension que vous avez fait paraître ci-dessus.

    La question de fond que vous soulevez est de savoir s’il est scientifiquement légitime d’emprunter des notions scientifiques d’un champ pour les utiliser dans un autre. Je crois que l’histoire des sciences se charge d’y répondre positivement, même si, souvent, ces notions ainsi empruntées sont, de par leur utilisation au sein d’un édifice théorique qui leur est hétérogène, s’en trouvent transformées et, tout aussi souvent, non reconnaissables par ceux qui fréquente leur domaine d’application d’origine. Il est alors facile à ces derniers de récuser les thèses construites ainsi.

    Cependant, il me semble que c’est là une erreur méthodologique, et même épistémologique, fondamentale. Il faudrait, pour qu’une telle démarche soit fondée, que la science dise la Vérité sur le réel, ce qui est loin d’être son objectif ; c’est là l’objet des religions, non des sciences. L’objet des sciences, bien plus modestement, est de construire des modèles permettant des représentations de la réalité en adéquation avec les expériences que nous pouvons en faire. C’est là, notamment, toute la discussion qui a opposé Einstein et Bohr, par exemple.

    Concernant la notion d’archétype, toujours de mon point de vue, la question n’est pas de savoir s’il existe ou pas ; ou alors cette question n’est pas scientifique, mais bien religieuse. La seule question qui peut être scientifiquement discutée est de savoir si cette notion, telle qu’elle apparaît au sein d’une théorie scientifique, est en cohérence avec cette théorie et le domaine d’expérience qui est celui de cette théorie. Je vous renvoie pour développer cela à la controverse entre Popper et Adorno.

    C’est la raison pour laquelle je ne peux accorder de valeur scientifique à votre point de vue d’anthropologue sur l’usage de la notion d’archétype au sein de l’édifice théorique de la psychologie analytique.

    Je vous accorderais, par contre, sans conteste la compétence de dire que l’usage que Jung fait de la notion d’archétype est non conforme avec celui qui en est fait en anthropologie. C’est ce que je retiens de vos propos, et qui ne m’étonne nullement, car cela a été dit déjà mainte fois. Mais, vous l’aurez compris, ce ne saurait remettre en cause l’usage qu’il en fait au sein de sa théorie de la psyché humaine et de sa clinique.

  • "Je répète cependant que je ne commente pas un livre que je n’ai pas lu, et que je n’ai, aujourd’hui, pas l’intention de lire."
    Cet aveuglement, ce refus de la contradiction montre bien que plus que pour la science, vous oeuvrez pour le dogme et que remettre en cause vos certitudes semble pour vous une chose impossible.

    "L’objet des sciences, bien plus modestement, est de construire des modèles permettant des représentations de la réalité en adéquation avec les expériences que nous pouvons en faire."

    Justement: l'expérience montre que les archétypes n'existent pas. Bâtir ensuite des théories sur des concepts qui n'existent pas relève ou de l'aveuglement (pour les plus crédules), ou de l'escroquerie intellectuelle.
    La question ne relève même pas de l'emprunt de méthodes et d'idées d'un domaine à un autre; ces emprunts sont tout à fait admis et même encouragés: cela s'appelle l'interdisciplinarité, pour reprendre un grand mot à la mode. Mais pour ce faire, il convient de procéder correctement, sans déformer ni truquer les méthodes du domaine auquel on s'intéresse. Or c'est l'un des points forts du livre – désolé, il faudra bien que vous vous penchiez dessus – que de montrer que Jung, tout en voulant asseoir sa théorie sur les travaux des ethnologues et anthropologues, avait un niveau de connaissances sur ce sujet ne dépassant pas le XIXe siècle. Sans cela il n'aurait pas eu besoin d'un fouet en peau de rhinocéros pour faire parler les Africains auxquels il a eu affaire.

  • Adressé à mon collègue F.Martin-Vallas,
    Tu prétends que les archétypes sont une "hypothèse scientifique", donc théoriquement susceptibles d'être sujets à débat, alors comment expliques-tu que la recension que j'ai faite du livre de JL Le Quellec - dont les thèses ne me paraissent pas polémiques, mais bien documentées et pertinentes - soit refusée par les deux rédacteurs en chef des Cahiers ? Effectivement, les archétypes devraient être considérées comme des hypothèses, mais dans les faits, ça n'est pas le cas, la preuve ! Il y a très vite, dans les exposés qu'on en fait, des glissements qui ont pour but de "démontrer" qu'ils sont des réalités, psychiques certes, mais correspondant à des facteurs agissants réellement sur le plan clinique. Tu m'excuseras, mais moi, je n'en ai jamais expérimenté l'efficience... C'est probablement parce que je ne suis pas aussi "individuée" que toi. Marie-Tour

  • Marie-Laure,

    Je ne comprends pas très bien ton argumentation.

    D’une part, je n’ai rien à voir avec les Cahiers Jungiens de Psychanalyse, revue indépendante au sein de laquelle je n’exerce plus de responsabilités depuis bien longtemps. J’ai d’ailleurs fondé une autre revue et, comme tout auteur le souhaitant, tu es invitée à y apporter tes contributions. La méthodologie de l’évaluation anonyme par les pairs évite bien des dérives, comme celle dont tu me dis avoir été récemment victime.

    D’autre part, le fait que les concepts soient souvent utilisés comme Vérité par les scientifiques qui les manipulent n’est pas une prérogative de notre communauté analytique. S’il avait fallu invalider tous les concepts scientifiques qui ont fait l’objet d’une telle dérive, alors je crois bien qu’il ne resterait, de la science, absolument plus rien. Le problème, là, est juste d’essayer de ne pas jeter le bébé scientifique avec l’eau du bain de la Vérité, et ce n’est pas simple !

    Enfin, je ne comprends pas ta remarque sur l’individuation. Quel rapport ? L’efficience du concept d’archétype est, pour moi, principalement liée au fait qu’il permet la cohérence interne de l’édifice théorique de la psychologie analytique. Son usage dans la clinique est une autre question, non présente dans ce débat, mais sur laquelle nous pourrons revenir en d’autres lieux si tu le souhaites.

  • Il est intéressant que personne ne revienne sur l'erreur inaugurale de ce livre. "2011; le centenaire de la mort de Carl Jung..." pourtant signalée avec indulgence par l'auteur de la recension du livre de son collègue Le Quellec. Erreur et défaut de relecture sans aucun doute, certains diraient lapsus. Et même certains pourraient sauvagement interpréter ce lapsus de l'auteur comme sa volonté inconsciente d'enterrer Jung bien profondément dans les replis de l'histoire, avec tous ceux, nombreux, qu'il lie à lui autour du mot à géométrie variable d'archétype, puis par honnêteté intellectuelle à l'origine et à l'histoire du nazisme. Adroite démonstration "rationnelle" et causaliste (de quelle cause d'ailleurs ?). Mais si le livre,composé avec de nombreuses citations indirectes, des traductions fluctuantes (se répondant en miroir parfois d'une page à l'autre), est truffé d'erreurs invérifiables sauf à faire preuve d'une motivation exceptionnelle, comment le lire en confiance, à moins d'adhérer à sa thèse (qui dépasse Jung évidemment) a priori ?

  • Bonjour,
    Il est particulièrement étonnant que vous ne cibliez que cette erreur - quand j'en ai relevé d'autres qui touchent, elles, le champ de la mythologie et non celui de la psychanalyse. Avec votre raisonnement, la présence de ces erreurs en mythologie voudrait dire que Jean-Loïc Le Quellec souhaite aussi enterrer les mythologues?

    "Mais si le livre,composé avec de nombreuses citations indirectes, des traductions fluctuantes (se répondant en miroir parfois d'une page à l'autre), est truffé d'erreurs invérifiables sauf à faire preuve d'une motivation exceptionnelle"

    Parfait, courageux anonyme: montrez l'exemple, et citez quelques unes de ces erreurs. Je suis tout à fait prêt à amender mon compte rendu si vous parvenez à en démontrer ne serait qu'une.

  • Cher "Ilarien".
    Merci de votre intervention que je trouve littéralement fascinante.

    Tout d'abord, vous aurez remarqué que toutes les personnes qui sont intervenues sur cette page l'ont fait sous leur nom véritable, pour commenter positivement ou négativement un livre que j'ai, moi aussi, publié sous mon vrai nom. Alors pourquoi diable intervenir en adoptant un pseudonyme? Je n'en vois nullement l'intérêt, et sachez que, si vous n'aimez pas ce livre, c'est parfaitement votre droit; si vous aviez signé votre factum de votre nom, je ne vous aurais pas pour autant convoqué sur le pré.

    N'ayez crainte, donc: à l'avenir, vous pourrez signer de votre nom véritable, comme nous tous ici.

    À moins que vous n'ayez quelque chose à cacher? Je n'ose y croire, et je n'envisage cela -- horresco referens -- que pour contempler toutes les possibilités. Rassurez-vous là aussi: je ne vois du tout pas ce que vous pourriez vouloir cacher, dans ce contexte. À moins que... ôtez-moi d'un doute ! À moins que vous ne soyez responsable de la censure de la recension que souhaitait publier Marie Tour? (J'écris "censure", car, vous le savez, "mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde"). Ce n'est là qu'une très lointaine éventualité, que vous me pardonnerez aimablement d'avoir envisagée l'espace d'un instant, "par honnêteté intellectuelle" comme vous l'écrivez si bien, et je suis bien certain que vous allez très vite la démentir, sous votre vrai nom bien entendu.

    Dans l'attente, je vois que vous trouvez "intéressant" que personne ne revienne sur ce que vous admettez être "erreur et défaut de relecture sans doute", tout en remarquant vous-même que cette erreur a déjà été signalée. Eh bien, figurez-vous que cette erreur, je l'avais moi-même signalée à l'éditeur dès la parution du livre, en lui demandant qu'elle soit, avec quelques autres que je vous laisse la joie de découvrir, corrigée au moins dans la version PDF de l'ouvrage. Il me fut alors répondu que c'était une bêtise tellement énorme que tout le monde verrait bien qu'il s'agissait d'une imperfection technique, n'entachant aucunement le contenu. Les éditeurs et les auteurs de recensions avaient naguère une formule toute prête pour cela, vous en souvenez-vous? "Les lecteurs auront rectifié d'eux-mêmes". Et de fait, bien sûr que tous les lecteurs rectifient d'eux-mêmes, et qu'il faut pratiquer une acribie bien mal placée pour ne relever, dans un tel volume, que ce seul détail insignifiant. Il est donc, en réalité, totalement inintéressant que personne n'y soit revenu. L'erreur a été signalée, cela suffit, passons aux choses sérieuses.

    Eh bien non, vous, vous trouvez cela intéressant, au point que c'est même la seule chose que vous citiez précisément dans ce travail de plus de 400 pages. À chacun ses centres d'intérêt, certes, mais c'est quand même un peu curieux. À moins que vous n'ayez, pour ce faire, une très bonne raison que n'avaient pas tous ceux qui, à votre grand étonnement, ne sont pas revenus sur cette broutille? Or qu'écrivez-vous à ce propos ? Que "certains pourraient sauvagement interpréter ce lapsus de l'auteur comme sa volonté inconsciente d'enterrer Jung bien profondément dans les replis de l'histoire". Bien sûr que vous, ce n'est pas du tout ce que vous faites. Faire une analyse "sauvage", c'est faire un bien mauvais usage de la psychanalyse, chacun le sait. C'est même, tout simplement, la dévoyer. Donc, vous, vous ne le faites pas, mais certains "pourraient" le faire. Si vous pensez à des auteurs en particuliers, n'hésitez surtout pas à nous en faire part ! À moins que vous ne pensiez à personne en particulier? Mon imagination limitée ne me laisse entrevoir que deux possibilités: soit "certains" se livreraient effectivement à une telle analyse sauvage, en pratiquant à mon égard ce qui relèverait tout simplement d'un procès d'intention, et alors il faudrait dénoncer cette pratique injustifiable, vous en conviendrez. Ou bien personne ne le fait, et alors je ne vois pas trop l'intérêt de votre supposition. À moins, à moins, encore une fois, que vous ne cherchiez à instiller dans l'esprit du lecteur qu'effectivement, j'aurais bien eu cette "volonté inconsciente d'enterrer Jung bien profondément dans les replis de l'histoire". Et que vous fassiez passer ce message en usant d'une habile prosopopée: ce n'est pas vous qui le dites, c'est "certains" qui "pourraient" le dire, et vous, vous ne faites que rapporter les propos putatifs et inexistants de ces critiques imaginaires. Face à de tels procédés, je formule sincèrement le souhait que vous ne soyez pas psychanalyste!

    Surtout que vous continuez en insinuant -- sans le prouver -- car il suffit de calomnier, n'est-ce pas, que le livre serait "truffé d'erreurs"'. Diable ! "truffé" ditez-vous ? Au vu du nombre de pages, il doit donc y en avoir quelques centaines! Ah, pardonnez-moi, je vous ai mal lu: là aussi, vous n'affirmez rien, vous employez un conditionnel, puisque vous écrivez textuellement "Si le livre ... est truffé d'erreur". Ce n'est donc qu'une éventualité. De plus, ces erreurs possibles seraient de toute manière "invérifiables". Ah! l'admirable concept que voilà! Des erreurs invérifiables. Dans ma grande naïveté, je me demande alors, si elles sont "invérifiables", comme l'on sait qu'il s'agit bien d'erreurs. Et du coup, vous posez cette question d'importance, que, je l'admets volontiers, on peu poser à propos de mon livre comme à propos de n'importe quel autre: si un livre est truffé d'erreurs invérifiables, comment peut-on le lire en confiance ?

    Mais j'y songe: qui vous a demandé de livre ce livre-ci "en confiance" ? Et plus généralement, d'où vient cette curieuse injonction, de lire un livre "en confiance"? Est-ce ainsi que vous lisez l'œuvre de Jung, par exemple?

    Si c'était le cas, ce serait très intéressant, car n'existe qu'une seule catégorie de livres qui puissent se lire ainsi: les livres exposant un dogme religieux. La Bible, le Coran, se lisent "en confiance". Mais un livre scientifique? c'est très simple: jamais. JA-MAIS, vous dis-je !

    Un détail encore: il semble vous avoir échappé que ce livre n'est en aucun cas une crique de Jung, et qu'en réalité son unique propos est de chercher à vérifier la validité de la notion d'archétype. Et à la vérifier de façon rationnelle.
    Mais il est vrai que vous, vous mettez "rationnelle" entre guillemets.
    Moi, non.
    Et ainsi, il apparaît qu'un monde nous sépare.
    Et même "plusieurs tout un monde", comme disait Armand Robin.

  • Ah, je vois que j'ai écrit "on peu poser", et que sur ce site, on ne peut pas corriger les envois postés. J'ai hâte de découvrir quel sombre dessein vous allez m'imputer à la constatation de cette nouvelle erreur.

  • Et pour vous éviter un effort supplémentaire: l'expression "plusieurs tout un monde" est utilisée par un autre grand traducteur de poésie, à savoir Stéphane Mallarmé, dans sa traduction de l'Annabel Lee, d'Edgar Poe.

  • Enfin: une "crique" ou une "critique"? Je ne doute pas que cette interrogation motivera chez vous de passionnantes réflexions, permettant que s'exprime pleinement votre acribie coutumière.

  • @ François Martin-Vallas. Ainsi, d'une part "L’efficience du concept d’archétype" serait "principalement liée au fait qu’il permet la cohérence interne de l’édifice théorique de la psychologie analytique", et d'autre part "Concernant la notion d’archétype […] la question n’est pas de savoir s’il existe ou pas". Donc, la cohérence interne de l'édifice théorique de la psychologie analytique reposerait tout entière sur une notion dont il n'est pas important de savoir si elle existe ou pas.
    Dont acte.

  • Réponse ci-dessous adressée à Patrice Lajoye.

  • Bonjour Patrice Lajoye,

    Dans votre dernière réponse vous écrivez : « Justement : l’expérience montre que les archétypes n’existent pas. Bâtir ensuite des théories sur des concepts qui n’existent pas relève ou de l’aveuglement (pour les plus crédules), ou de l’escroquerie intellectuelle. »

    N’est-ce pas, là, ce qui fonde notre dialogue de sourds ? Vous posez, en effet, qu’un concept puisse exister, ou pas. Pour moi, la question de l’existence ne peut se poser que pour un objet, non pour un concept. La seule question qui concerne un concept est celle de sa pertinence, non de son existence.

    Cette différence d’appréciation tient probablement au fait que vous tenez, dans votre champ, les théories pour représentation d’une réalité empirique, alors que dans le champ de la psychologie, et a fortiori de la psychanalyse, elles ne peuvent valablement être tenues que comme théories formelles. Je vous concéderai cependant que, jusqu’à ses échanges avec Pauli, Jung a longtemps confondu théorie formelle et théorie empirique, ce qui rend effectivement sa lecture difficile.

    Cordialement,

  • En tenant compte de cette étrange conception d'un concept, qui devient pour le coup ni vérifiable, ni démontrable, et pour lequel on n'a pas la moindre envie de le vérifier ou de le démontrer, on sort du domaine de la recherche scientifique pour entrer dans celui de la pataphysique.
    C'est intéressant en soi, mais cela peut faire peur quand on pense que certains se servent de cela pour "guérir".

  • Lisez donc la controverse entre Adorno et Popper, et aussi Morin, bref, intéressez-vous un peu à l'épistémologie, et, peut-être, votre vision de la science sera un peu moins XIX°.

    Cordialement,

  • Ah là là, la fameuse Positivismusstreit. Une drôle de querelle qui avait des accents de congrès de Tours de la SFIO avec quarante ans de retard...
    Quoi qu'il en soit, et même si visiblement il vous est plus facile intellectuellement de vous attaquer à un compte rendu d'ouvrage qu'à l'ouvrage lui-même, si vous avez la prétention d'être scientifique, acceptez la contradiction (ie, le livre de Jean-Loïc Le Quellec), étudiez-la aussi objectivement que possible et réfutez-la si vous vous en pensez capable.
    Mais comme vous semblez particulièrement obtus sur ce point, j'ai comme le sentiment que cela n'arrivera pas.
    Mais pour ma part, et j'en resterais là, il vaut mieux avoir une vision trop XIXe siècle de la science, que de baser ses propres méthodes sur les élucubrations d'un falsificateur, sans même chercher, par dogme, à les vérifier.

  • Lorsque l’on a, comme moi, et certainement suis-je loin d’être le seul, longuement étayé sa pratique clinique sur la théorie jungienne des archétypes, le livre de Jean-Loïc Le Quellec est extrêmement déstabilisant. Bien que cet auteur ne soit pas un clinicien, mais un anthropologue, et bien que ses interprétations puissent sembler ici ou là partiales et polémiques, son propos ne peut pas, à mon avis, rester ignoré des analystes que nous sommes. Il me paraît être au contraire une invitation à réfléchir, à penser, à évoluer et à renouveler notre posture et nos pratiques.
    Pouvons nous faire abstaction des archétypes ?
    Cette notion ne serait-elle qu’une croyance sans fondement scientifique ?
    Jean-Loïc Le Quellec dénonce, avec une certaine véhémence les dérives potentiellement dangereuses de la notion d’archétype. Mais qu’est-ce qui est véritablement dangereux ? Est-ce bien la notion d’archétype ? Ne s’agirait-il pas plutôt de l’idée que nous pouvons nous en faire, autrement dit de nos représentations et de l’usage que nous en faisons ?
    A titre personnel je me réfère de manière préférentielle au chapitre Instinct et inconscient de L’énergétique psychique, c’est à dire que pour moi la notion d’archétype s’enracine dans l’être psycho-somatique et la biologie. Je ne suis pas certain qu’il en soit de même pour tous. Non pas que je veuille prétendre par là que mon point de vue serait meilleur ou moins bon qu’un autre, mais je souhaite simplement souligner que nous nous construisons très probablement des représentations assez diverses et variées de ce concept « limite », en lui-même irreprésentable comme l’affirmait Jung. Et nous savons tous qu’à l’endroit de ce que nous ne parvenons pas à nous représenter, c’est l’imaginaire, le fantasme qui prend la relève... Ma sensibilité personnelle, de médecin aussi, m’incite donc à privilégier le biologique.
    C’est à ce titre que je me suis intéressé à l’œuvre d’un chercheur en biologie et en épistémologie au centre Cavaillès de l’École normale supérieure de Paris, Jean-Jacques Kupiec, sur lequel j’aimerais un moment attirer votre attention parce qu’il me semble que sa pensée pourrait être aidante face à la difficulté posée par l’ouvrage de Jean-Loïc Le Quellec.
    Jean-Jacques Kupiec mène des recherches interdisciplinaires à la croisée de la biologie, de l’histoire et de la philosophie de la biologie. Il étudie le vivant (notamment le rôle qu’y joue le hasard) d’un point de vue philosophique, théorique et expérimental. Dans les années 1980 et 1990, la biologie moléculaire expérimentale a constitué son activité principale dans le cadre de ses fonctions à l’Inserm, et depuis 2003, la biologie théorique, l’histoire et la philosophie de la biologie sont devenus son activité principale. A partir d’un modèle initial de différenciation cellulaire probabiliste, il a développé une théorie de l’embryogenèse et du fonctionnement du vivant fondée sur l’idée que la sélection naturelle se poursuit à l’intérieur de l’organisme. Il a notamment développé le concept d’ontophylogenèse (l’ontogenèse et la phylogenèse sont les deux faces d’un seul phénomène) à partir des données de la recherche expérimentale et à partir d’une analyse sur l’ontologie de la biologie. Pour l’illustrer, il a réalisé des modélisations de cellules qui se différencient de manière probabiliste et sont stabilisées par leur environnement (leur différenciation peut, par exemple, se manifester à l’échelle macroscopique par la formation d’un muscle ou d’un os). Cette théorie vise à résoudre les contradictions du réductionnisme génétique (l’ordre dans le vivant par les molécules) d’une part, et du holisme (l’ordre par le tout de l’organisme) d’autre part.
    Dans un livre, paru en 2008, intitulé « L’origine des individus », il explique longuement comment déterminisme et probabilisme ne sont pas opposés, mais que le déterminisme est simplement une limite du probabilisme, lorsque la probabilité est égale à 1. Par conséquent le probabilisme n’exclue pas la reproduction : plus la probabilité est élevée, plus la reproduction est forte.
    Un phénomène aléatoire est caractérisé par sa moyenne et sa variance, et lorsque sa variance est faible, un phénomène aléatoire ressemble à un phénomène déterminé.
    Or, lorsqu’un phénomène aléatoire est la résultante d’un trés grand nombre de phénomènes eux-mêmes aléatoires, il montre que sa variance est d’autant plus faible que le nombre de phénomènes dont il résulte est grand, ce qui est précisémment le cas des individus, en particuliers humains. Ce serait donc à tort que l’on considèrerait l’homme comme déterminé par son hérédité, l’homme serait en réalité aléatoire.
    Cette conception de l’homme aléatoire s’oppose épistémologiquement à la conception essentialiste d’ordre déterministe.
    Et peut-être que le reproche principal que Jean-Loïc le Quellec adresse à la conception jungienne des archétypes est son essentialisme. Les archétypes pourraient donc ne pas être déterminés, (et donc universels temporellement et spatialement) mais aléatoires et relatifs à l’environnement, et plus ou moins stabilisés par l’interaction entre l’individu et son environnement externe et interne.
    Ainsi, ces structures pourraient être différentes d’un environnement à l’autre et dans une certaine mesure évolutives à une échelle séculaire, comme le supposait d’ailleurs Jung.

  • Et j'en profite pour souligner que dans Instinct et inconscient (publié dans L'énergétique psychique) figure p.101 une référence à Platon comme source de la notion d'archétype...

  • @ Gérard Davoni : Je n'ai pas la traduction française de Instinct and the Inconscious, mais dans les Collected Works, voici ce que dit Jung exactement. Il cite certes Platon, mais pour aussitôt dire que lui, Jung, a emprunté le concept d'archétype à saint Augustin !

    «In Plato, however, an extraordinarily high value is set on
    the archetypes as metaphysical ideas, as "paradigms" or models,
    while real things are held to be only the copies of these model
    ideas. Medieval philosophy, from the time of St. Augustine — from whom I have borrowed the idea of the archetype....»

  • Je voudrais ajouter, pour préciser mon propos, qu'à mon point de vue, l'archétype ne représente que l'hypothèse d'un organisateur psychique, comme l'exprime Jung dans son article "Instinkt und Unbewusstes : « Les archétypes sont des formes typiques de la compréhension, et partout où il s'agit de compréhension constante et revenant régulièrement, il s'agit d'un archétype... » Je pense en effet que c'est une illusion de les considérer comme universels, cette "universalité" étant toute relative

  • La notion d'archétype me paraît être en premier lieu une intuition ensuite devenue une conviction de Jung.
    Il en aurait cherché la confirmation/preuve en se lançant dans une recherche a priori orientée, partiale et sélective, ne retenant que les éléments confortant son hypothèse ; plus grave encore, en falsifiant certaines données, comme tend à le montrer Jean-Loïc Le Quellec.

    Quel serait le fondement de son a priori ?
    Peut-être l'analogie corps psyché : la structure psychique serait analogue à la structure corporelle (anatomie) et en lien étroit avec elle. Cette intuition me semble une piste intéressante, mais le point discutable serait alors épistémologique (ou philosophique) : Essentialisme (jungien) au sens ou l'essence précéderait l'existence ou bien Nominalisme (Existentialisme) qui ouvre sur l'hypothèse de l'humain aléatoire postulée par Jean-Jacques Kupiec.

  • Si j'ai bien saisi l'argument du Docteur Francois Memier, l'archetype, en tant que concept psychologique, serait une idee aleatoire qui represente un schema qui est capable d'etre discerne suivant le contexte temporel ou spatial, mais qui retient un aspect essentiel. Si non, le concept ne sert a rien du tout.

  • Non pas une idée, mais un organisateur psychique aléatoire, en amont de l'idée.

  • Pendant qu'il est encore temps, allez donc voir l'exposition Bruno Decharme - art brut / collection abcd à la galerie La maison rouge 10 bd de la bastille 75012 Paris

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